Si vous êtes un lecteur assidu des offres d'emploi, vous aurez
certainement déjà buté sur le nom de cette nouvelle fonction en vogue :
supply chain manager. Cette dénomination que l'on pourrait traduire par
directeur de la chaîne d'approvisionnement recouvre selon les entreprises
des réalités parfois fort différentes.
On la confond souvent avec la logistique, explique Guy
Huyberechts, supply chain manager chez Carrefour Belgium. C'est
pourtant différent. La logistique, c'est la partie opérationnelle, la
mise en œuvre des flux de marchandises. La supply chain, c'est la partie
organisationnelle. Nous sommes en charge de la gestion de l'ensemble des
flux marchands, du stock de nos fournisseurs jusqu'aux réserves des
magasins. Nous avons une vue transversale sur tout le processus
d'acheminement des produits ce qui nous permet d'optimaliser la chaîne
pour que le temps écoulé soit le plus court possible et les coûts les
moindres. La logistique et la supply chain sont complémentaires.
La supply chain, en tant que département reconnu à part entière,
n'existe que depuis 2 ans chez Carrefour. Quatre-vingts personnes y
travaillent. Il fallait avoir une vue globale sur toute la chaîne
d'approvisionnement, se souvient Guy Huyberechts. Avant, chaque
entité (le dépôt, le fournisseur, le magasin) s'occupait uniquement
d'elle-même. L'intégration des différentes contraintes n'était pas
prise en compte. En prenant de la hauteur, on peut proposer des
changements pour que la chaîne soit plus rentable. N'y a-t-il pas trop
d'intermédiaires pour ce flux, trop de ruptures de charge, les stocks ne
sont-ils pas trop importants, n'y a-t-il pas trop de casse dans le
transport des marchandises ? On améliore constamment la chaîne.
Péremption et dispersion
Ces améliorations sont parfois mineures. Récemment, j'ai constaté
qu'il y avait beaucoup de casse dans l'approvisionnement en eau minérale.
C'était dû au fait que des magasins commandaient des demi-palettes qui
basculaient dans les camions ou dans les réserves. J'ai suggéré que les
magasins commandent dorénavant des palettes entières. Plus important,
nous avons dû plancher il y a peu sur l'intégration des produits
Carrefour en complément de la chaîne d'approvisionnement des produits
GB. Un fameux boulot.
Les employés de la supply chain sont censés suivre en permanence la
marchandise, où qu'elle soit : en Thaïlande ou dans un container en mer
Méditerranée. Une mission pas toujours aisée lorsque l'on sait qu'un
hypermarché contient pas moins de 60.000 produits différents, distribués
par 10.000 fournisseurs à travers le monde. Au problème de la dispersion
géographique s'ajoute celui de la péremption des marchandises. Il est
clair qu'on n'analyse pas un flux de légumes comme un flux de boîtes de
conserve. Pour le frais, il faut travailler en flux continu, sans stocks.
Mais frais ne veut pas dire aliment. Des appareils électroniques (GSM,
ordinateurs) peuvent avoir une très courte durée de vie qui impose
d'agir rapidement. Pour d'autres produits, on doit jouer sur le long terme
en anticipant parfois des mois à l'avance. Nous sommes en train de passer
les commandes pour les collections du printemps 2003....
L'accroissement de la concurrence a rendu la fonction supply chain nécessaire
dans la plupart des grosses entreprises. L'optimalisation de la chaîne
logistique est bien souvent l'un des derniers moyens encore efficaces pour
faire baisser les coûts. A cet égard, les nouvelles technologies de
l'information élargissent considérablement les possibilités. Carrefour
a développé une plate-forme e-business avec ses fournisseurs pour que
les commandes et factures puissent transiter via le réseau. A l'instar de
ce qui se fait déjà dans l'industrie automobile, pionnière en matière
de supply chain.
Acquérir le métier sur le tas
Le profil du supply chain manager peut être varié. Guy Huyberechts
s'occupe depuis le début de sa carrière d'informatisation,
d'automatisation et d'amélioration du « process ». Il faut
être généraliste pour exercer ce métier car il est important de connaître
tous les rouages de l'entreprise. On peut avoir une bonne formation théorique
mais le mieux, c'est encore d'acquérir le métier sur le tas. Nous
recrutons d'ailleurs très large pour ce poste : des logisticiens, mais
aussi des ingénieurs et des économistes.
Les qualités nécessaires ? C'est une fonction de coordination. Il
faut donc être bien organisé. Des talents de communicateur et une
certaine aisance relationnelle sont essentiels car c'est un boulot d'équipe.
Enfin, il faut pouvoir être à l'écoute des différents intervenants de
la chaîne et faire preuve d'une forte détermination. Quand on crée ou
modifie un flux, il faut y croire et pouvoir convaincre les gens de
terrain du bien-fondé de votre décision.
JEAN-FRANÇOIS MUNSTER
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